Hello ! Ca fait longtemps, mais on est de retour dans ta boite mail aprĂšs avoir dĂ©branchĂ© en deuxiĂšme partie de confinement. JâespĂšre que vous allez bien, et que vous dĂ©confinez avec prĂ©caution et respect de lâhumanitĂ©.
Au menu aujourdâhui :
- Derniers paragraphes quant au coronavirus, ou du moins Ă lâaprĂšs covid
- Interlude montagnes et solitude
- Petite reflexion autour de TikTok et SoundCloud et des différences culturelles
- Une interview Culture & Brand de Kate Losse, dans un nouveau format
Lesssgo
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Dans The world after coronavirus, publiĂ© le 20 mars, Yuval Noah Harari fait tirailler mon coeur entre espoir et rĂ©signation. Comme beaucoup de textes traduisants la situation actuelle comme une crystallisation des problĂšmes gĂ©nĂ©rĂ©s depuis quelques dizaines dâannĂ©es, il est difficile de ne pas ĂȘtre dâaccord tant le chaos visible Ă tous les niveaux exacerbe nos difficultĂ©s.
Parmi les problĂšmes, il Ă©voque la population rĂ©primĂ©e plutĂŽt quâinformĂ©e, la tentative de crĂ©er le faux choix parfois imposĂ© aux citoyens entre vie privĂ©e et santĂ©, et la tentation gouvernementale de voir en cette situation une opportunitĂ© pour exploiter la technologie au service de la surveillance. A ce sujet, bien que jây sois peu intĂ©ressĂ© (câest pas bien), jâai trouvĂ© intĂ©ressante cette tournure :
It is crucial to remember that anger, joy, boredom and love are biological phenomena just like fever and a cough. The same technology that identifies coughs could also identify laughs.
Il y a Ă©galement un point politique (autre chose qui mâintĂ©resse peu) que je suis curieux de suivre sur les mois et annĂ©es Ă venir. De la mĂȘme maniĂšre que des Ă©tats dâurgence dĂ©clenchĂ©s Ă travers le monde depuis des annĂ©es semblent ne jamais prendre fin, les mesures prĂ©vues pour le coronavirus pourraient sâĂ©terniser. Pour Yuval :
But temporary measures have a nasty habit of outlasting emergencies, especially as there is always a new emergency lurking on the horizon.Â
[âŠ] Even when infections from coronavirus are down to zero, some data-hungry governments could argue they needed to keep the biometric surveillance systems in place because they fear a second wave of coronavirus, or because there is a new Ebola strain evolving in central Africa, or becauseâ.â.â.âyou get the idea.
Ă©dit : Ce qui est bien quand on met deux mois Ă Ă©crire une newsletter, câest que certaines thĂ©ories ont le temps de se rĂ©aliser. Câest ici le cas avec la Chine et la possible adoption permanente de leur Stopcovid national :
La promesse, comme dans beaucoup de discours sur âlâaprĂšsâ, est la suivante :
We should also take into account the long-term consequences of our actions. When choosing between alternatives, we should ask ourselves not only how to overcome the immediate threat, but also what kind of world we will inhabit once the storm passes. Yes, the storm will pass, humankind will survive, most of us will still be alive â but we will inhabit a different world.Â
CĂŽtĂ© solution, et câest la que mon coeur tremble, lâauteur croit (ou espĂšre) en une rĂ©organisation population-politique-mĂ©dias-science.
La tendance actuelle Ă la centralisation du contrĂŽle et Ă la rĂ©pression comme maniĂšre de gĂ©rer une sociĂ©tĂ© sous crise nâest Ă©videment pas souhaitable. Pour Yuval :
When people are told the scientific facts, and when people trust public authorities to tell them these facts, citizens can do the right thing even without a Big Brother watching over their shoulders. A self-motivated and well-informed population is usually far more powerful and effective than a policed, ignorant population.
Il dĂ©veloppe ainsi en quoi le lien entre population, classe politique, mĂ©dias et science est Ă reconstruire car nettement abimĂ©. Et en quoi la situation actuelle pourrait ĂȘtre une opportunitĂ© de sây atteler.
Le 20 mars, je lisais ça en partageant lâespoir. Presque deux mois aprĂšs, je relis ça et me demande âest-ce possible ?â. Voire mĂȘme âest-ce quâon en a vraiment quelque chose Ă faire ?â. Est-ce quâune utopie globale est possible ? Jâai franchement la flemme de vous argumenter en dĂ©tail pourquoi je nây crois personnellement pas tant la situation actuelle est un cirque.
Jâai abandonnĂ© la politique il y a longtemps, mais ce quâon peut voir du gouvernement ne me donne aucun espoir.
La confiance en les mĂ©dias comme principe gĂ©nĂ©ral est difficile dans un monde oĂč chacun a le(s) sien(s), aussi intĂšgres ou biaisĂ©s soient ils, et dans lesquels le traitement de lâinformation a pris le dessus sur les faits traitĂ©s, et lâidĂ©ologie sur le fait tout court.
La science et les scientifiques, jây crois fort alors que je nâai jamais jurĂ© par ça principalement. Mais lâidĂ©e dâune population âwell-informedâ par la science, câest pas pour demain. Il y a un gap gigantesque entre les papiers acadĂ©miques de 160 pages et les posts Facebook que ma mĂšre peut lire. Câest un sujet qui mâintĂ©resse pas mal. Si les scientifiques ont une bonne partie des rĂ©ponses quant Ă ce quâil va nous arriver dans 10 ans, comment, en tant que sociĂ©tĂ©, ne pas attendre 10 ans pour se rendre compte quâils avaient raison ? Il y a une opportunitĂ© rien que dans la mise en forme de leur savoir qui, pour lâinstant, ne peut pas aspirer Ă trouver un Ă©cho global et reste tristement ignorĂ© bien quâimportant.
Au sujet du rapport science-politique, Jean Allary a récemment publié un post qui reprend une interview de Régis Debray. Il y dit :
âLe savant dit le fait, le politique dit ce quâil faut faire, et lâun ne se dĂ©duit pas de lâautreâ. Il est illusoire de penser que la science peut gouverner puisque son empirisme la condamne au doute, ce qui est sinon intolĂ©rable du moins souvent reprochĂ© en politique.
Ce qui me fait penser Ă une tierce personne qui semble intĂ©ressĂ©e par le problĂšme. Le Silicon-Vallois, qui, depuis quelques mois, semble de plus en plus sâintĂ©resser Ă la politique (et ce que ça peut leur apporter) aidĂ©e par la science et la data. Son ambassadeur pourrait ĂȘtre Balaji Srinivasan dont le mode opĂ©ratoire âbashing des politiques de rĂ©gulation + bashing des mĂ©dias wokes de gauche + ultra rationalisme choisiâ semble trouver son audience. Dans la pratique, creuser des Ă©tudes scientifiques est aussi un nouveau status-game pour le Silicon-Vallois, avec sĂ©lection, interprĂ©tation et appropriation pour se distinguer et prĂ©senter ses idĂ©es. Fin de lâapartĂ©.
Et pour ce qui est de la population, câest trop compliquĂ© pour moi. Encore plus que le reste je veux dire. Pour paraphraser @notoriousbigre quand on parlait de ça : je pense quâon a vraiment du mal Ă saisir Ă quel point on ne comprend rien Ă la majoritĂ© des gens en tant quâanalyste. Essayer de comprendre lâhumain dĂ©confinĂ© au milieu de cette cacophonie, entre besoins et devoirs, entre prioritĂ© et hiĂ©rarchie, entre individualisme et collectif, entre le normal et lâahurissant, entre le recommandĂ© et lâobligatoire, entre le dĂ©libĂ©rĂ© et lâindiffĂ©rence, entre le besoin primaire et lâĂ©goĂŻsme, entre Zara et le canal saint martin⊠est une tĂąche complexe dans laquelle je ne vais pas mâaventurer.
Cette cacophonie nâaidera pas lâespoir dâune prise de conscience globale et le besoin dâembarquer tout le monde, comme souhaitĂ© par Yuval plus haut, car cette crise montre Ă nouveau que lâindividualisme nâest plus trop un concept choisi mais un mode par dĂ©faut. Il y a des humains cools, bien entendu, ceux qui confectionnent des masques pour les autres par exemple, mais ces efforts individuels dâentre-aide sont rapidement rĂ©primĂ©s par dâautres humains dont les intĂ©rĂȘts se situent plus âhautâ.
Il y a Ă©galement deux concepts que jâaimais bien et qui ont Ă©tĂ© esquintĂ©s Ă mes yeux ces derniers temps.
Le ânew normalâ est rapidement passĂ© dâune possible banniĂšre sous laquelle sâĂ©crivait des pistes futuristiques plus ou moins intĂ©ressantes, Ă un titre de slide Ă©clatĂ©e annonçant que 55% des français prĂ©fĂ©reront les marques avec qui ils partagent des valeurs personnelles. Huge if true.
Et aprĂšs tout :
Lâautre concept qui nâa plus trop dâintĂ©rĂȘt, câest le âbon sensâ. Jâai tenu longtemps en y croyant, mais force est de rĂ©aliser quâil nâexiste pas. Ou quâil nâen existe pas quâun seul. Le bon sens Ă lâheure de lâatomisation de nos moyen de trouver du sens est improbable. Son utilisation politique dĂ©crite dans ce court thread (5 tweets) montre mĂȘme quâil est une meilleure arme pour ajouter du flou au flou plutĂŽt que pour y trouver des rĂ©ponses :
Juste pour finir, je vous partage lâarticle qui mâa le plus intĂ©ressĂ© parmi la vingtaine que jâavais ouvert depuis dĂ©but mars, What will the world be like after coronavirus? Four possible futures. Il est challengeant comme on dit chez ceux qui portent des vestes de costume + jean + baskets de jeune. Jâaime bien son approche qui ne dĂ©crit pas la situation liĂ©e au covid-19 comme un Ă©vĂ©nement sociĂ©tal extra ordinaire mais comme le prolongement de dynamiques dĂ©jĂ en place :
The responses to the COVID-19 pandemic are simply the amplification of the dynamic that drives other social and ecological crises: the prioritisation of one type of value over others.Â
La valeur priorisĂ©e dont lâauteur parle est celle la suivante :
Currently, the primary aim of the global economy is to facilitate exchanges of money. This is what economists call âexchange valueâ. The dominant idea of the current system we live in is that exchange value is the same thing as use value. Basically, people will spend money on the things that they want or need, and this act of spending money tells us something about how much they value its âuseâ. This is why markets are seen as the best way to run society. They allow you to adapt, and are flexible enough to match up productive capacity with use value.
Câest ce que lâauteur challenge dans le reste de lâarticle pour dessiner 4 futurs possibles, des alternatives que lâon ose habituellement mĂȘme pas imaginer dans son milieu tant le consensus thĂ©orique quant Ă lâĂ©conomie est cimentĂ© depuis 40 ans. Il dessine ces futurs en utilisant une mĂ©thode empruntĂ©e des futures studies dĂ©crite dans la piĂšce.
VoilĂ , jâai dĂ©jĂ trop parlĂ© dâun sujet que je ne voulais plus traiter. Et en plus câest pour me plaindre. Ou pĂȘut-ĂȘtre que je raconte nâimporte quoi et je suis peut ĂȘtre simplement un nostalgique du confinement Ă qui le temps suspendu manque dĂ©jĂ .
Terminons avec cette pensée fulgurante :
đ Pause đ
Une interlude assez radicale pour marquer la fin du sujet prĂ©cĂ©dent : la petite histoire (30 ans) de Dick Proenneke Ă la recherche de la solitude et de lâauto-suffisance en Alaska. via Aeon, un mĂ©dia relaxant.
đ» Plateformes culturelles et plateformes de rentabilitĂ© đ»
Super post de Bas Grasmayer : Instagram vs SoundCloud: the battle for the center of music culture.
La premiĂšre partie du post raconte comment SoundCloud sâest installĂ© lors de la transition MySpace -> Facebook, de ses innovations communautaires grĂące Ă des features bien senties jusquâau choix contestable de jouer des coudes avec Spotify, mĂȘme si ce nâest pas ce que leurs utilisateurs attendaient.
Pourtant, le point principal de Bas est le suivant : le rĂ©el concurrent de SoundCloud nâest pas Spotify, mais Instagram. Pourquoi ? Car ce sont les principes communautaires de SoundCloud en ont fait un acteur culturel Ă part dans le domaine musical :
SoundCloud was the place for the freshest music. SoundCloud enabled new communities to emerge and connect, and those communities enabled SoundCloud to have the newest in music before it was available anywhere else. [âŠ] What has always defined SoundCloud is its community that pushes boundaries of genres and develops new styles.
Jâai dĂ©jĂ ventĂ© les mĂ©rites de SoundCloud dans une newsletter prĂ©cĂ©dente (la premiere il me semble), et en quoi elle est une plateforme musicale plus intĂ©ressante que Spotify de part sa capacitĂ© Ă faire naĂźtre des courants et permettre Ă des artistes de se construire (avant mĂȘme de chercher Ă se dĂ©velopper) et expĂ©rimenter sur leurs univers. Chose trĂšs limitĂ©e sur Spotify, tant la machine est algorithmĂ©e et tend Ă la convergence plus quâĂ la divergence.
Cette divergence basĂ©e sur lâaccessibilitĂ© et la mise Ă disposition aux artistes dâoutils pour expĂ©rimenter, faisant de SoundCloud un terreau propice Ă lâĂ©mergence de nouveautĂ©, est aujourdâhui trustĂ©e par Instagram :
SoundCloud is where it pops off, but the community doesnât really connect there anymore.
En voulant trop se comparer Ă Spotify, SoundCloud a laissĂ© de cotĂ© ses principes de connections communautaires et son support des artistes au profit dâun lourd travail pour Ă©toffer leur catalogue plus classique. Un produit qui a peu Ă©voluĂ©, une version mobile ne permet pas de faire grand chose dâautre que streamer (on ne peut mĂȘme pas lire ses DMs), des nouveautĂ©s peu pertinentes dâun point de vue social⊠Et il nâen faut pas plus pour que SC se fasse dĂ©passer par Instagram sur leur propre terrain. Le community center sây est dĂ©placĂ©.
Ce que je trouve intĂ©ressant ici, câest quâil nâest pas question de streaming. SoundCloud, comme MySpace et Instagram, dĂ©passe cela. Ces trois acteurs ont un role culturel, lĂ oĂč Spotify (ou Deezer et Apple Music) ont un rĂŽle plus rationnel, fonctionnel et mercantile.
Je me suis rĂ©cemment posĂ© la question dâoĂč se posait TikTok dans cette catĂ©gorisation. Plus particuliĂšrement au prisme de la danse, car câest ce que jâobserve le plus ressortir de TikTok comme pratique artistique (avec lâhumour peut-ĂȘtre ?). AprĂšs avoir un peu observĂ© le sujet et discutĂ© avec le brillant Toby Shorin, jâen suis venu Ă me dire que TikTok est plus proche dâune plateforme dâagrĂ©gation que de crĂ©ativitĂ© originale. Avec la particularitĂ© dâĂȘtre une plateforme dâagrĂ©gation de signaux culturels, dans le cadre de la danse, plutĂŽt quâune plateforme de crĂ©ation. Quelques points qui me sont venus en tĂȘte :
Lâutilisation de la danse comme une monnaie sociale Ă©phĂ©mĂšre et dĂ©contextualisĂ©e plus que comme une pratique artistique et culturelle : la danse sur TikTok prend principalement place dans des chorĂ©graphies destinĂ©es Ă la performance sur la plateforme. DĂ©contextualisĂ©es de leur cadre culturel usuels, les chorĂ©s sont conçues sur des critĂšres diffĂ©rents de ceux que lâont retrouve habituellement dans la pratique artistique. Le style, la fluiditĂ©, la prĂ©sence, lâattitude ou le contrĂŽle ne priment pas, et laissent place Ă des critĂšres plus âdirectsâ comme la complexitĂ©, la longueur ou lâesthĂ©tique. La TikTok danse est plus facilement mesurable, mais avec beaucoup moins de profondeur. Cette exploitation simpliste des esthĂ©tiques au dĂ©triment du process complexe de crĂ©ation artistique permettra difficilement, par manque dâintĂ©rĂȘt, dâen faire ressortir des danseurs ou des danses qui sâinstalleront dans la culture mĂšre sur le long terme.
Le manque dâintĂ©gration avec le reste de la culture : conçus dans des temps plus lents oĂč le clip Ă©tait un artĂ©fact culturel hyper fort, le crank that de Soulja Boy ou le swag surfin de F.L.Y sont des danses qui agrĂ©mentaient les sons, les vidĂ©os et les univers des rappeurs (parfois des villes ou des pays). Ces Ă©cosystĂšmes culturels ont Ă©tĂ© indispensables pour permettre de forger lâempreinte culturelle quâont pu avoir ces pas de danse (la liste est longue). Bien quâil sâagisse de performances physiques, TikTok ne promeut pas (encore?) de culture dĂ©passant celle de son application. Du coup TikTok danse pour TikTok et son algo. Pas de quoi marquer lâHistoire, imo.
LâĂ©phĂ©mĂ©ritĂ© et la #challenge culture : la culture est un processus lent qui ingĂšre, digĂšre, assimile et retient. La danse sur TikTok est propulsĂ©e par des challenges dont la durĂ©e de vie est Ă peu prĂšs Ă©quivalente Ă celle du hashtag qui les prĂ©cĂšde. Cette dimension Ă©phĂ©mĂšre, couplĂ©e au climat compĂ©titif, invite Ă toujours proposer plus, sans jamais se concentrer sur quelque chose pour lâaffiner. Un challenge en efface un autre et TikTok se concentre sur le dernier arrivĂ©, le plus tendance sur la plateforme, en mettant lâancien de cĂŽtĂ© sans mĂȘme lâavoir digĂ©rĂ©. Jâai du mal Ă voir comment une pertinence culturelle solide peut en ressortir si rien nâest fait pour crĂ©er un patrimoine.
TikTok a un sĂ©rieux problĂšme de propriĂ©tĂ© et dâattribution : les crĂ©ateurs originaux (souvent des afro amĂ©ricains) se font emprunter leurs crĂ©ations sans reconnaissance, ni des autres utilisateurs, ni de TikTok, ni des mĂ©dias, qui favoriseront la version diluĂ©e de la star cute sans saveur. Ce qui pose des problĂšmes de crĂ©dibilitĂ© sur le long terme. Ce thread Ă©tant un exemple parmi dâautres :
VoilĂ , je ne sais pas trop oĂč en venir. Je crois que jâavais besoin de mettre ces choses en perspective car jâai pu lire ici et lĂ des termes comme âTikTok cultureâ, un concept que je ne saisissais pas trop si on y cherche autre chose que la culture du meme.
Puis Toby mâa sorti ça :
I guess I think youâre right but whatâs more likely to happen is that tiktok will eat hip hop. [âŠ] I do think we'll se a generation of "tiktok rappers" that push the game forward the same way soundcloud did.
Avant de devenir un meme, SoundCloud a contribuĂ© pendant des annĂ©es Ă lâĂ©volution du rap grĂące Ă lâĂ©mergence de courants et de styles (genre lâedm, la trap, le mumble rap ou lâemo rap) et de nouvelles maniĂšres de produire, distribuer et communiquer, le tout depuis le placard du beatmaker. Comme MySpace en son temps et comme dĂ©crit par Bas dans lâarticle initial. Mais pour moi TikTok en est encore loin.
Pour pouvoir aspirer Ă crĂ©er une vague de TikTok rappers, la plateforme devrait ĂȘtre en mesure de promettre plus quâun one hit wonder aux artistes pour devenir un terreau crĂ©atif. La question pour TikTok est de savoir comment concilier la vitesse Ă laquelle est consommĂ©e la plateforme avec la construction de lâidentitĂ© dâune artiste, de son univers et de ses expĂ©rimentations comme SoundCloud et MySpace dans le passĂ©. Je nâen ai aucune idĂ©e.
En plus de ce challenge, TikTok doit aussi faire face Ă ses propres contraintes : le format hyper court. Comment devenir une plateforme de crĂ©ation culturelle majeure quand la durĂ©e maximale dâune vidĂ©o est dâ1 minute ? Si Spotify a rĂ©ussi Ă reconfigurer lâindustrie au profit de sons plus courts, dâalbums plus longs et de systĂšmes de playlists, alors TikTok a peut-ĂȘtre une chance. Les recrues multiples venant de lâindustrie doivent probablement dĂ©jĂ sây atteler.
Etant donnĂ© les ambitions tentaculaires de TikTok et sa soif de reach, jâai du mal Ă voir le produit Ă©voluer vers un outil dâĂ©mergence artistique et culturel comme SoundCloud a pu lâĂȘtre. Je nâai rien lu sur leurs ambitions ou leur stratĂ©gie, jâaurais peut-ĂȘtre dĂ» avant dâĂ©crire tout ça lol. Mais pour lâinstant ça semble plutĂŽt ĂȘtre un canal de distribution de contenus dont on peut quasi-manufacturer le succĂšs tant les ressorts sont mĂ©caniques. Je mets donc TikTok avec Spotify dans la catĂ©gorie des plateformes sans grande ambition culturelle, mais balĂšzes en chiffres.
Cette opposition entre (MySpace /) SoundCloud et Spotify / TikTok, câest un peu une lutte entre crĂ©ativitĂ© et efficience. Le son est crĂ©Ă© sur des plateformes expĂ©rimentales (les deux premiĂšres), puis il est exploitĂ© sur des plateformes de rentabilitĂ© (les deux derniĂšres). Est-ce que lâidĂ©e de âTikTok rappersâ peut prendre forme sur une plateforme de rentabilitĂ© ? Il me semble que Spotify nâa pas encore sorti de âSpotify rappersâ (mais pas mal de vrais-faux groupes servants Ă combler les playlists Ă thĂšme). Est-ce que TikTok peut porter cette double casquette ? Est-ce quâune plateforme lâa dĂ©jĂ fait ? YouTube peut-ĂȘtre ?
âïž What is Culture? What are Brands? âïž
Nouveau format et premier test dâune sĂ©rie oĂč lâon fait parler les gens !
LâidĂ©e est de poser une grande question assez vague, avec trois petites questions dedans qui reprennent le thĂšme brands & culture de la newsletter. Les interviewĂ©s sont choisis par apprĂ©ciation personnelle et invitĂ©s Ă rĂ©pondre de maniĂšre libre et sous format et dĂ©lais libres. Ce ne sont pas forcĂ©ment des ami.e.s, juste des gens dont jâai volĂ© un bout de cerveau au dĂ©tour de quelques conversations sur twitter . com.
La premiĂšre invitĂ©e est Kate Losse đ. Une auteure qui parle de culture numĂ©rique at-large. Elle a Ă©galement Ă©tĂ© lâemployĂ©e n°51 de Facebook, au support client dâabord, puis comme product manager et ghostwriteuse de Mark Zuckerberg ensuite. Elle parle de cette aventure dans The Boy Kings, un mĂ©moire qui raconte lâĂ©volution de la startup et de sa culture interne Ă cette Ă©poque. Pour en savoir un peu plus, voici une interview de Kate.
Il est des sujets si larges quâil est impossible dâen avoir des dĂ©finitions arrĂȘtĂ©es. Les invitĂ©s dans cette sĂ©rie nâont pas de hashtags dâexpertises dans leur bio twitter ou linkedin, mais des points de vues gĂ©nĂ©ralement intĂ©ressants sur pas mal de choses đ
Branchez vos Google Traducteurs, voici la réponse de Kate :)
What is âCultureâ to you and how do you see it evolving? What is the role of a brand today?
I've always thought of culture as working a lot like the economy â there are periods where things are moving really fast, and there is lots of visible "cultural production" happening and the business that goes with it, and periods where things slow down. The times when things slow down is often when paradigms shift and new tastes and trends emerge. It seems to me like many of the trends that defined the 2010s were forged in 2009-2013. After that, the rest of the decade was an explosion of trends that were developing in the earlier part of the decade. So it is interesting to be experiencing another "down time" ten years after that recession. I feel sure that things will develop during this down time that will define the rest of our new decade. Cultural trends that were getting tedious will fall away quickly this year, leaving room for new things to grow.Â
I would say that the trends forged in 2009-2013 were for example the concept of the entrepreneurial social media influencer, who builds a "following" utilizing technologies like Instagram that allow the followers to inhabit the influencer's visual brand, at least while on the app. Instagram launched in 2010 and while it didn't really get huge until the mid-2010s, the seed of that kind of single-minded, entrepreneurial person-vs-world brand project were formed in the early days of Instagram's development, particularly in its early adopters who were mostly tech entrepreneurs in San Francisco looking to be the next big thing.Â
Related to that trend are many of the visual aesthetics of the 2010s, which seemed to become very "algorithmic" as the decade progressed. For example, the popularity of matched colors on Instagram, where photographs are staged to intentionally match all the colors in the image, but with slight variations. It reminds me of an algorithm computing slight variations on a particular taste that you might have. "If you like this color, you will probably like this color that is very close to it."
As the decade progressed it seems like those early trends â the "influencer", the color-matched aesthetic, etc â seemed to sort of grow exponentially until you saw them everywhere, everything was an extrapolation of these things. But explosions end, and the pandemic is interesting in how it has sort of forced people to settle down and live in a more reductive way. It will be interesting to see what happens next in terms of what becomes popular after the frenzy that came before is left behind.
I feel like one thing that might happen is that "authenticity" will mean something different after the pandemic. Authenticity as an idea became such a marketing term in the 2010s to the point of being meaningless or even, meaning its opposite. "Authenticity" came to feel manipulative and corporate. The fact that the pandemic stripped everything down to its basics I think will mean that people won't be fooled by "authenticity" as a marketing term anymore. Brands will have to find ways to be truly relevant, since after the pandemic people know the difference between something that is truly useful and something that just wants you to like it. Brands will always have a place as a way to symbolize an entity/utility to their customers, but I'm hoping we'll see an increase in real quality/utility in brands and less branding-for-branding's-sake.
Si vous voulez lire le dernier article de Kate, câest ici. Elle a Ă©galement regroupĂ© ses Ă©crits lĂ .
Cdt et portez-vous bien,
hellofdp.