Hello !
Deux facteurs qui n’aident pas à se concentrer mais qui j’espère ne dépeigneront pas sur ce que je raconte dans cette newsletter : je suis en vacances + je découvre La Villa Des Coeurs Brisés. Rigolez pas, je crois que je cherche inconsciemment à ne pas trop processer la réalité inattendue du couvre-feu alors que j’ai payé pour être au soleil (je reste dans le territoire, jugez pas trop).
Aujourd’hui on parle de branding, d’amour, de médiocrité et d’esthétiques.
Bonne lecture.
Feinte
Avant tout, je l’ai rt mais je remets ici l’initiative de mentoring de Zoe et sa pote Robyn. Je crois que c’est survenu après avoir observé que des types faisaient payer des centaines de dollars des étudiant.e.s ou des jeunes pour pouvoir avoir accès à des mentors plus ou moins renommés. Quelque chose d’abberant en somme.
Si des jeunes (ou moins jeunes) lisent ceci et sont intéressés par des personnes présentes dans cette liste mais n’osent pas trop, je suis dispo pour faire le lien avec ces gens (ceux que je connais du moins) ou ma sauce Zoe pour les autres. Le mentoring est vraiment sous côté dans ce pays, si ça peut aider let me knowww.
🏳️ Marques blanches 🏳️
Welcome to Your Bland New World est un exposé assez clair des conventions branding des startups D2C (Direct 2 Consumers, aussi appelées DNVB pour Digital Native Vertical Brands) dont sont friands les investisseurs tech depuis quelques années. Ces startups ont des codes de marque assez similaires qui traduisent un global manque d’imagination ou de conscience du principe de branding.
L’anglais c’est pratique et on passe de “Brands” à “Blands” comme si c’était fait exprès, une aubaine pour le journaliste qui présente ainsi le phénomène :
What are blands?
All startups seek to disrupt and disintermediate a smug status quo, or originate and dominate an entirely new niche. But what makes a brand a bland is duality: claiming simultaneously to be unique in product, groundbreaking in purpose, and singular in delivery, while slavishly obeying an identikit formula of business model, look and feel, and tone of voice.
La suite est une analyse de ces critères rendant ces marques peu originales et particulièrement insipides que je vous laisse découvrir.
Je crois réellement que le monde de la tech n’a aucune idée que l’industrie du marketing et de la pub, des marques quoi, a théorisé et conceptualisé quand même pas mal d’éléments. Par mépris de la publicité “traditionnelle” ou par ignorance, ou pour une autre raison, je ne sais pas.
Parmi ces concepts qui pourraient intéresser les startupos, au coeur de la question Differentiation vs Distinctiveness explorée par Byron Sharp, on retrouve celui d’ownable brand assets (que je ne vais pas tenter de traduire) :
Distinctive brand assets are ones that are memorable and attractive and provide sensory and semantic cues that get noticed and stay top of mind.
Examples include: logo, tagline, jingle, colour & packaging.
Des éléments de marque assez primaires, assez premier degré, plus tangibles que des concepts comme la raison d’être ou tout ce qu’on peut retrouver dans une pyramide de marque. Des éléments qui forgent l’identification, la distinction et les connections, donc.
Their value isn’t so much in the assets themselves, but in what they bring to mind for your audience and what people associate them with. It is the associated meaning of your brand that encourages action – but it is the assets that act as the trigger for this meaning.
La logique derrière ces principes peut être schématisée de la manière suivante :
Noah Brier dans sa newsletter Why Is It Interesting - The AirSpace Marketing Edition fait le même rapprochement, avec un focus particulier sur l’esthétique ‘AirSpace’ et la Brooklynification du monde, et le quadrant rouge ‘Avoid’ du schéma si dessus. Et finit par se poser la question : “how many brands end up making ads for their competitors?”.
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Je ne sais pas pourquoi mais ce principe de distinction et de brand assets m’intéresse. J’ai pas mal réfléchi à son pendant numérique, quand une des tendances de l’industrie était la création dans tous les sens d’applications propres pour les marques, insufflée généreusement par le travail de R/GA avec Nike.
Est-ce qu’il existe un concept d’ownable brand asset dans la conception d’un produit digital ? Je n’ai jamais réellement trouvé de ressource qui parlait de ça sous cet angle. J’avais commencé à essayer de développer des idées quand j’ai eu l’occasion de bosser sur ce type de projets, mais j’ai fini par me dire que c’était un non-sujet.
Cela-dit, depuis des années, qu’il s’agisse d’UX de sites e-commerces ou de l’uniformisation des produits consumer, les gens du milieu ne manquent pas de relever la même manque d’originalité apparente présentée précédemment :
J’avais vu passer ça l’année dernière et ça m’a rappelé ce sujet. Mais comme d’hab, 0 explication de pourquoi le fait que des grids de 4 apps de streaming se ressemblent soient un si gros problème (typical ‘gros claim / 0 idée de quoi il parle’ de Jack Applebly tho). L’exemple de Cherie Hu, une extension du précédent, pointe du doigt la même chose : une certaine forme de standardisation dans la structure et le design du contenu. ‘They literally all look the same’.
Je n’ai pas leurs réponses quant au si gros problème qu’ils évoquent. Est-ce qu’ils disent ça par principe, car oui ressembler au reste n’est peut être pas l’idéal du branding ou du design, ou par profonde conviction sans pour autant nous partager leur théorie.
M’est idée que la plupart des sites, des apps ou des magasins physiques partagent une architecture et une organisation proches pour deux raisons qui se nourrissent : les gens attendent cela + ça fonctionne. Un produit standardisé a plus de chance de coller à des comportements et attentes pré-déterminées qu’un produit marginal qui demanderait trop d’efforts.
Quand on y pense, prétendre à la distinction ou à la différenciation par le design dans le cas d’un produit numérique, c’est sacrément compliqué / ambitieux. Cela impliquerait généralement de créer de nouveaux principes d’interaction, ou de navigation. Ca sonne simple, on en a tous imaginé, mais de l’idée à l’adoption il y a une réalité d’exécution qui rend ces nouveaux principes rares et compliqués à instaurer. Il en existe peu, ie: les stories de snapchat ou le swipe de tinder comme gros exemples récents. Et le succès de ces principes vont souvent de paire avec le triomphe d’une manière nouvelle de framer un problème (snapchat, tinder, slack, etc).
Je parle de nouveaux principes d’interaction et non juste de principes visuels car le visuel est bien souvent superficiel. Je ne vois aucun produit numérique qui s’est installé essentiellement par son originalité graphique. La différenciation / distinction par le visual design c’est souvent du flan utopique et/ou irréalisable. Ils en parlent bien chez Intercom, notamment à travers leur post intitulé The dribbblisation of design, en référence à la plateforme sociale de designers Dribbble qui célèbre un peu trop le beau en dépit du pratique.
La différence entre les brand assets d’une marque et d’un produit numérique est peut être là. Un produit numérique se pratique, là où une marque s’identifie. Ou quelque chose du genre, j’en sais rien. Dans tous les cas, appliquer les mêmes principes traditionnels pour analyser un produit numérique est une approche un peu lazy qui fait abstraction des particularités de l’exercice.
💕 Interlude - The Question of Love 💕
‘Defend love as a real, risky adventure’ prône le philosophe Alain Badiou. Un peu boomer quand il parle de rencontres, mais beau quand il parle d’amour.
Plus sur cette série sur Nowness.
🥤 Internet, garage à médiocrité 🥤
En 2014, ma stare Kate Loss décrivait dans Weird Corporate Twitter comment les marques tentaient de s’intégrer dans le discours public sur Twitter en s’appropriant l’humour des pionniers, en les remplaçant et en standardisant la pratique.
To become popular and “cool,” brands have had to learn the very techniques we learned as resistant teens to deal with power: our sarcastic humor and our endlessly remixable memes. Corporate #weirdtwitter redeploys the memes we once used to signal our resistant identities to one other to make themselves seem like our sassy peers. In other words, Denny’s the corporation wants a seat at the table at the Denny’s where we used to go to meet and commune with other teens in all our midnight, underground, post-all-ages-show angst.
7 ans plus tard, la pratique est devenue aussi mainstream que la plateforme. Plus largement, internet est une grande scène sociale où tout le monde peut jouer dans son coin tout en créant une masse. Le Corporate Twitter est devenu le Mediacore.
Mediacore: An Analytical Manifesto de Rishi Dastidar en est un peu le rulebook. Rishi propose Mediacore comme contraction de Media + Mediocre, concept traduisant la médiocrité que nous produisons collectivement pour remplir internet.
4. Right now, an under-analyzed and reported upon majority of people in the developed world are engaged in making this mediocre shit. It is collectively, in one form or another, called ‘media’. In this case, the inverted commas are expansive, allowing almost any form of production of communications, messages and entertainment, in any industrial or post-industrial sector of the economy, to be in some way classified as ‘media’.
Il y décrit l’engrenage dans lequel la plupart d’entre nous (we are the faceless hordes now employed in indefinable, mid-level ‘media’ jobs’) sommes pris :
23. Where a successful day can be described as one where what those have words have led to — a tweet, a picture, a microfilm, a short film, an app, a blog, a post, a snippet of code — receives some sort of spiralling circulation amongst a disinterested yet ever increasing population size, and low-to-non existent approbation, as indicated by the weakest of physical interactions.
Et de nous mettre face au déni global des remplisseurs d’internet que nous sommes :
10. We are not unique. Even though we continue to believe that we are unique.
11. This is one of our key qualities — an ability to ignore screamingly obvious and salient evidence and data points that should, by rights, change the stories we tell ourselves, the wider world.25. You will, by now, wondering why the word ‘content’ has not appeared yet in this analysis?
26. Because this is, we posit, the first indicator, the first ‘tell’ of Mediacore — that no one involved in it makes ‘content’. No one believes that their working hours are spent in producing this. They are always making something else.
30. The self-hatred comes from the second indicator of Mediacore: that we are far too good to be doing this shit.
31. We could have been contenders. Instead we are content-makers.
32. All our qualifications, emendations, commendations, and we end up doing this? Contributing only the trivial, the ephemeral, the insubstantial?33. Yes, the problem solving bit is interesting; the difficulty is having to deal with and explain the solutions to, and we quote “all the morons”.
34. The response to this difficulty? To over-index on behaviourial, aesthetic and sartorial choices that emphasise Mediacore’s self-willed perception as different, aloof, unique.
La critique peut sembler gratuite ou facile, mais l’auteur (et moi même) s’inclut dedans + j’aime bien quand ça parle de médiocrité en toute conscience des choses.
Le sort de cette spirale est approchée dans les 30 prochains points de Rishi que vous pouvez checker vous mêmes.
🪄 𝖆𝖊𝖘𝖙𝖍𝖊𝖙𝖎𝖈𝖘 🪄
Trouvé sur The Atlantic, Cottagecore Was Just the Beginning est une chouette et courte (ré-)introduction à la notion d’aesthetics.
Si Tumblr m’y a introduit il y a des années, je m’interroge aujourd’hui parfois sur ce concept, et plus particulièrement sur sa pertinence. Est-ce un puit de signaux potentiellement hyper importants, ou est-ce un amas de vraies-fausses tendances inexploitables en réalité. Si c’est quelque part au milieu, quelle est son importance et son intérêt ?
Depuis quelques temps je traine un peu sur le discord des contributeurs du wiki/List_of_Aesthetics pour tenter de comprendre ce qui les anime. Il y a une vraie dynamique dans leurs explorations et un travail indéniable que j’aime bien. Tumblr avait déjà commencé ce travail de décryptage et construction communautaire et récemment le cottagecore de fin 2019 / 2020 a re-dynamisé la volonté de comprendre et classer ces esthétiques.
Il y a ce passage à un moment qui tente une liaison entre aesthetics et vibe :
At this point, the word aesthetic is totally divorced from its academic origins. While Tumblr users mainstreamed it years ago, many teenagers use aesthetic as an all-purpose adjective—“that’s so aesthetic” as a shorthand for “that’s so aesthetically pleasing to me.” But in broader internet parlance, it now means a collection of signifiers or, more precisely, a “vibe.”
A propos de vibe et de vibing, un autre concept un peu flou mais indéniablement réel que je cherche à creuser, Mary Retta a publié On Vibing qui explore une interprétation personnelle du concept.
J’ai pas grand chose à dire car je process encore les idées moi-même, donc je poste juste ça là.
Et pour finir, des tweets qui traînent :
Point charos de la tech :
Point calvaire des gens intelligents j’imagine :
Point j’ai jamais su ce qu’était un insight, peut être que ça y ressemble :
C’est tout pour aujourd’hui, portez-vous bien et bon courage,
xoxo