Salut les potes. JâespĂšre que vous allez bien. DeuxiĂšme Ă©dition, dĂ©jĂ en retard. Impeccable.
Au menu aujourdâhui :
đ€ Une petite ĂŽde Ă la mĂ©diocritĂ© dans une sociĂ©tĂ© et une industrie oĂč on aime bien tout intellectualiser ou au moins faire semblant.
đ Ensuite, pavĂ© de Gaming et pourquoi câest le turfu de lâentertainment.
đ© Pour finir, interview dâun des chefs dâHaigo, design studio qui vient dâĂȘtre acquis par Sid Lee.
Bonne lecture !
đ€·ââïž Gloire Ă la mĂ©diocritĂ© đ€·ââïž
Je ne sais plus trop comment je suis tombĂ© sur le blog de Nadia Eghbal mais elle Ă©crit des choses trĂšs cool. Dans son post Being basic as a virtue elle explique comment elle peut se sentir Ă©touffĂ©e par le besoin de trouver, affiner et Ă©changer des idĂ©es. Besoin suscitĂ© aussi bien par son activitĂ© professionnelle que par son environnement personnel. Que ça soit autour dâun cafĂ©, lors dâune soirĂ©e ou sur Twitter, lâauteure observe une professionnalisation des conversations oĂč un âtâas vu / lu quoi derniĂšrement ?â rĂ©sonne comme un âtu taffes oĂč ? t ki ?â. La pression sociale dâavoir un avis sur tout nâaide pas et parasite sa maniĂšre de penser et dĂ©velopper des idĂ©es.
En cherchant Ă se protĂ©ger ou se dĂ©fendre, elle croise un bouquin et en vient Ă se demander si une partie du bonheur ne serait pas ailleurs. Si volontairement ne pas vouloir aller chercher trop loin et se pencher sur la simplicitĂ© et lâinnocence portĂ©es par le âbasicâ de âbasic bitchâ (minus le cĂŽtĂ© sexiste) pouvait la faire grandir.
Une intellectualisation du small talk, une tribune pour le small thinking.
đź Le gaming, plus que jamais le turfu đź
Il y a des industries culturellement plus fortes que dâautres. Câest le cas du jeu vidĂ©o. Je pense que câest trĂšs liĂ© Ă la profondeur de ce qui peut se trouver derriĂšre une boĂźte posĂ©e dans un rayon de magasin. La valeur du produit est dĂ©risoire quand on le compare Ă la valeur de lâunivers auquel il donne accĂšs : un univers de passionnĂ©s et tout ce qui va avec, qui se vit sur un canapĂ© ou un fauteuil mais qui permet aussi de se retrouver un soir de match Ă Bercy.
Un univers ainsi soutenu par la commoditĂ© mais aussi par le sentiment dâappartenance et la communautĂ©, mode de vie progressivement abandonnĂ© par nos sociĂ©tĂ©s mais que lâon dĂ©sire dĂ©sespĂ©rĂ©ment aujourdâhui. Des leviers faisant le bonheur de lâindustrie qui propulse cette passion.
Câest un peu ce quâaborde lâexcellent Matthew Ball dans un post intitulĂ© 7 Reasons Why Video Gaming Will Take Over. Dans lequel il dĂ©montre, en mĂȘlant points de vue historique, Ă©conomique et sociologique, comment le jeu vidĂ©o est phase de finaliser sa conquĂȘte de lâEntertainment.
#1 â The Dominant Attention Medium, Television, Has Peaked and its Time is Being Redistributed : La place du jeu vidĂ©o dans lâĂ©conomie de lâattention et du loisir.
#2 â Gaming is Replicating the TV Package : Comment le gaming a rattrapĂ© lâoffre TV.
#3 â Gaming Has Unprecedented Content Leverage : Les potentiels dâextensibilitĂ© du medium grĂące Ă la participation.
#4 â Social Signals, Effects, and Reinforcement : Pourquoi jouons nous et pourquoi jouerons nous encore plus dans le futur.
#5 â Tightest Feedback Loops + Culture : Patcher pour gagner.
#6 - Consistent Growth Through New Devices, Categories, Technologies, Content : Le potentiel unique de croissance du medium.
#7 â IP Kiln : Le jeu vidĂ©o comme bande dessinĂ©e moderne.
đŹ Questions-RĂ©ponses avec un Design Studio qui monte đŹ
Convaincu depuis quelques annĂ©es quâun pan du futur de notre industrie se trouve dans le design dâexpĂ©riences, jâobserve avec curiositĂ© lâĂ©volution dâHaigo depuis leur arrivĂ©e.
Haigo est un design studio français qui soufflera sa cinquiÚme bougie cette année. Ils sont une trentaine de designers, stratÚges et program managers, organisés en petites équipes, à travailler sur des produits, des services et leurs expériences.
Ce que jâaime bien câest quâils nâont dâautres prĂ©tentions que de âcrĂ©er des choses utiles, et faire en sorte qu'elles sortent rapidement, avec le sourire et en impliquant nos clientsâ. Alors ça sonne simple, peut ĂȘtre trop simple pour notre industrie qui affectionne les envolĂ©es linkedinesques ou pseudo-littĂ©raires, mais je suis assez convaincu que câest ce dont nous avons le plus besoin aujourdâhui. Ils donnent lâimpression de faire partie de ces boites qui se disent diffĂ©rentes mais qui le sont vraiment.
FraĂźchement acquis par Sid Lee et la superstructure kyu, jâai Ă©changĂ© avec lâun des fondateurs, Guewen Loussouarn, pour lui poser quelques questions Ă ce sujet. Le mot dâordre : ne pas trahir les siens et permettre de rĂ©elles opportunitĂ©s.
LâintĂ©gralitĂ© non Ă©ditĂ©e est Ă retrouver ici, en format brut. Une interview fleuve comme on dit chez Telerama.
Morceaux choisis, édités pour la concision (lol).
Sur le constat quâils ont pu faire du marchĂ© en France avant de se lancer :
Le premier constat qu'on a fait au tout début, c'est qu'en agence, on ne travaillait pas vraiment avec nos clients et que ça expliquait beaucoup de nos frustrations. En agence, tu vois ton client dans des moments trÚs cadrés : une prise de brief, un meeting de présentation et de validation, un dej ou un apéro de temps en temps.
Tu conçois des choses avec toute ton Ăąme et le rĂ©sultat final est hyper dĂ©cevant car il est passĂ© par beaucoup d'intermĂ©diaires et que des mois se sont Ă©coulĂ©s.Â
Quand on a commencĂ©, on n'avait pas de bureau, alors on a demandĂ© Ă notre client (AXA) si on pouvait avoir un badge permanent et travailler dans son open space. Durant les premiers jours, j'ai dĂ©couvert les vrais problĂšmes de mes clients, leurs quotidiens et tout ce qu'ils ne peuvent pas mettre dans un brief. Ils Ă©taient aussi frustrĂ©s que nous sur les process, les dĂ©lais, les incomprĂ©hensionsâŠÂPartager le mĂȘme espace de travail, ĂȘtre focus sur un seul client et un nombre limitĂ© de sujets, ça change tout. Je ne comprends vraiment pas pourquoi les agences ne s'imposent pas des journĂ©es chaque semaine chez leurs clients. Ăa m'a l'air d'ĂȘtre du bon sens.
Le deuxiÚme constat, c'est que la plupart des briefs présagent de la solution sans partir d'un vrai besoin d'un vrai utilisateur, et sont donc voués à donner naissance à des choses qui ne marcheront pas. Quand on me demande de travailler sur une application ou un site, avec un cahier des charges hyper précis, je sais qu'on est déjà sur la mauvaise voie. Il faut revenir à ces cas d'usage, formulés en bon français avec des objectifs simples, pas faire du techno push.
On refuse beaucoup de briefs, non pas car ils sont trop prĂ©cis, mais parce qu'ils ne partent pas de vrais problĂšmes utilisateur. On a eu des conversations ubuesques avec des services Achats qui comprenaient notre dĂ©marche mais devaient quand mĂȘme faire une app, parce que le budget avait Ă©tĂ© validĂ© et que le comex attendait une app. Merci, mais non merci.
Le gap quâils essayent de combler :
On ramĂšne le client et l'utilisateur au centre de tout : le produit ou l'expĂ©rience et les dĂ©cisions. J'ai le souvenir d'un atelier avec un grand annonceur autour de leur futur plateforme de marque. On commence par demander aux clients de nous raconter leur expĂ©rience avec le produit, qui est un produit de grande consommation [âŠ] Certains n'Ă©taient mĂȘme pas clients de leur propre marque, alors qu'ils ont un accĂšs privilĂ©giĂ© aux offres etc.Â
Je parle aussi souvent du programme Get Out There de Ogilvy au UK. Ils n'avaient pas vu le Brexit arriver, et ont donc invitĂ© leurs planneurs stratĂ©giques, dont c'est le mĂ©tier de comprendre les gens, Ă se rendre une fois par mois dans de petites villes pour se rapprocher des vrais gens. C'est hyper rĂ©vĂ©lateur du malaise en agence je trouve. (spoiler : câest la problĂ©matique que lâon souhaite travailler avec hellofdp)
Le gap pour moi, c'est qu'on a silotĂ© cĂŽtĂ© annonceur et cĂŽtĂ© agence jusqu'Ă ce qu'on ne sache plus pourquoi et pour qui on bosse. En ramenant le client du client au milieu, on rĂ©aligne les intĂ©rĂȘts de tout le monde.
Au sujet de leur acquisition par Sid Lee / kyu :
Je pense avoir bien ouvert le moteur sur LinkedIn dans la note qui accompagne l'annonce.
Un truc qui nous a marquĂ© aussi, c'est leur rĂ©ponse Ă la question "c'est quoi vos challenges ?". [âŠ] Ils nous ont parlĂ© d'industries et de pays Ă explorer, de sujets Ă craquer dans leur maniĂšre de travailler⊠lĂ oĂč pour beaucoup d'acteurs la rĂ©ponse Ă©tait souvent "La croissance" dans des instances assez formelles.
Leur histoire à eux est aussi une histoire d'entrepreneurs, qui se sont fait racheté, et 5 ans aprÚs ils sont encore là avec de l'envie, c'est hyper rassurant.
On voulait continuer Ă grandir sereinement, pouvoir s'appuyer sur un rĂ©seau en place et complĂ©mentaire, lĂ on est entre IDEO et Sid Lee, avec SYpartners ou Digital Kitchen Ă portĂ©e de voix, c'est quand mĂȘme fou.
Lâattrait des grandes structures pour les design studios :
Je pense qu'un Design Studio, ou du moins une boßte qui travaille sur le produit et l'expérience globale comme Haigo et a atteint une taille raisonnable, c'est intéressant pour plein de types d'acteurs.
Les cabinets de conseil qui doivent montrer qu'ils ne font pas que du PowerPoint et peuvent dĂ©livrer.Â
Les agences qui voient leurs marges et leur CA diminuer car elles n'arrivent plus à valoriser leurs idées et cherchent un relai de croissance.
Les SS2I qui sont hyper bons sur la production (le quoi et le comment), mais doivent remonter sur la chaĂźne de valeur (le pourquoi).
Des annonceurs qui veulent internaliser les savoirs faire et les talents qui vont les aider Ă enfin transformer leurs maniĂšres de travailler.
Sur les principales différences dans la pratique de la stratégie et de la conception entre les agences tradi et un design studio :
La StratĂ©gie, pour une agence, câest lâinsight, la tendance, la comprĂ©hension du marchĂ©, la vision de la maniĂšre dont la marque peut sây inscrire, y prendre la parole pour Ă©merger et sĂ©duire. Si je caricature, la partie Ă©mergĂ©e de lâIceberg.
Pour nous, câest la vision du produit, le lien avec le business, les enjeux internes de transformation⊠dans la caricature, la partie immergĂ©e de lâIceberg.Pour le Design, une agence va ĂȘtre vraiment sur le rendu final, la Direction Artistique, lĂ oĂč on va ĂȘtre sur lâexpĂ©rience, voire la vision systĂ©mique (cf la confĂ©rence de Patrick sur le sujet).
Dans la maniĂšre de travailler, nos approches hyper intĂ©grĂ©es avec beaucoup de co-crĂ©ation oĂč les idĂ©es viennent de partout, ça peut dĂ©stabiliser un crĂ©atif ou un concepteur habituĂ© Ă avoir presque le monopole lĂ dessus. Le fait quâon soit presque mono sujet, capable de bosser pendant 5 jours complets sur un seul projet, dans un mĂȘme lieu, en acceptant quâon ne fera pas tout, câest trĂšs diffĂ©rent de ce qui se pratique en agence. Et je ne te parle pas du fait quâon passe 3 Ă 4 jours par semaine chez nos clients.
Tout ça est hyper complĂ©mentaire, mais il faut quâon soit raccord sur les bonnes maniĂšres de relier nos approches et mĂ©tiers. Par exemple, on pense que la Recherche Utilisateur peut enrichir le Planning StratĂ©gique, et que notre approche hyper centrĂ©e utilisateur peut grandement bĂ©nĂ©ficier dâune vision Marque diffĂ©renciante.
Notre approche peut ĂȘtre hyper âfonctionnelleâ lĂ oĂč un crĂ©atif dâagence va amener une dimension Ă©motionnelle. Quand tu combines les 2, franchement, câest top : câest quand mĂȘme beaucoup plus facile de promouvoir des produits qui ont Ă©tĂ© bien conçus. Combien de fois on a vu de super campagnes pour des produits pas top ? On a dĂ©jĂ commencĂ© Ă travailler ensemble, on apprend encore, mais tout le monde a envie. On ne fera pas tout ensemble, mais il y a des moments clĂ©s oĂč ça peut faire la diffĂ©rence.
Ce quâon a en commun et quâon aura toujours, câest le plaisir de crĂ©er des choses qui vont ĂȘtre vues et/ou utilisĂ©es par un maximum de gens. La bonne idĂ©e, le craft, lâexĂ©cution, lâenvie de le montrer⊠câest clairement notre ADN commun.
Vous les trouverez sur Twitter ou sur internet.
Fin.
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