Bonsoir à tous, bonsoir à toi.
La dernière newsletter remonte à bien longtemps et nous n’en sommes pas fiers. Le travail et quelques projets à côté ont pas mal challengé le rythme 1NL/semaine. On pourrait penser que le confinement est l’occasion idéale pour redevenir plus productif mais, pour l’instant, c’est un peu l’inverse pour moi. Je préfère faire autre chose que de lire des trucs.
Pensée à tous ceux qui ont du mal à traverser cette phase, qu’il s’agisse de galère à adapter sa vie pro ou perso. Et à ceux qui ont des proches au front.
De notre côté, côté hellofdp, c’est un peu relou. On rigole à moitié à l’idée de vraiment faire quelque chose de cette fausse agence et, depuis quelques mois, on songe à tenter de lancer quelque chose. On s’interroge encore sur le modèle et le scope de l’offre. Du coup, toujours sans trop se prendre au sérieux, on essaye de rencontrer et d’échanger avec des gens. A Londres notamment, car l’industrie n’est pas exactement la même qu’ici et qu’il y a des acteurs particulièrement intéressants. Il était prévu d’en rencontrer quelques uns fin mars, dont CrowdDNA, OnRoad et une researcher que j’apprécie beaucoup. Malheureusement, un pangolin braisé aux 5 épices à l’autre bout de la planète a fait sauter l’agenda. C’est dommage et pas cool pour la motivation, mais au fond ce n’est pas très grave compte tenu de la situation pour d’autres.
Sans transition, la newsletter du jour. Ayant du mal à me concentrer sur des choses trop sérieuses, la situation actuelle faisant un peu relativiser, ça sera un format un peu spécial, avec moins de rédaction et plus de liens. Faites votre marché (no pun intended).
Ca parle de pandémie et des faiblesses de nos cultures, de foot au féminin, de la vertu de l’écoute, de méthodologie du questionnement, du rôle des productions artistiques et des artistes à l’heure des réseaux sociaux, et d’une agence que l’on kiffe.
Let’s go.
🦠 Virus culturel 🦠
Pioché dans une de mes newsletters prefs (La vie matérielle de Tiphaine), ‘Panic, Pandemic, and the Body Politic’ explore le covid-19 comme attaque contre nos systèmes culturels plus que nos systèmes immunitaires. Un test pour nos sociétés à faire face à des désastres d’échelle mondiale.
For many centuries, the conflict driving the plot engine of the human race has been the tension between individualism and collective behavior—between the goal of independent flourishing and the concept of the common good. As a species, we have spent several centuries nurturing a collective mindset that rejects collective endeavor, and most of us are living in nations that seem perilously convinced that the human race is a thing you can actually win.
The collective psychology of neoliberalism encourages self-interest and short-term thinking. It both creates and requires human lives that are organized around the kind of constant insecurity and stress that actively prevent us from thinking beyond the next fiscal quarter. The diseases that are most successful in the coming century will, as always, be the diseases that exploit our major failure modes and popular delusions.
Comme de plus en plus ces derniers temps, il est question de remise en question de fonctionnements au niveau institutionnel VS systèmes établis, de changement de comportements individuels VS volonté et, comme très souvent, de court-termisme VS long-termisme (un mot qui, paradoxalement, n’existe pas). Les parallèles avec l’urgence climatique sont évidents, à la différence importante que cette catastrophe est beaucoup plus graduelle et s’applique à l’humanité, là où le covid-19 est beaucoup plus véloce et réel dans les imaginaires.
🧍♀️⚽️ Mi-temps ⚽️🧍♀️
Regardez FOOTEUSES si ce n’est pas encore fait. Par Yard, Ryan Doubiago & Lyna Saoucha.
🔇 S.T.F.U 🔇
Partisan de l’idée d’Épictète selon laquelle “we have two ears and one mouth so we can listen twice as much as we speak”, j’ai aimé l’article The Right to Listen - As citizens of a democracy, we need to hear one another. Why can’t we? qui se consacre à l’Écoute. Astra Taylor interroge l’Écoute comme composante de la Démocratie (et plus largement de la société commune) à travers expériences personnelles en tant que réalisatrice de documentaires et observations historiques.
L’Écoute n’est pas quelque chose d’acquis. Elle nécessite d’être dans une posture, un effort et une certaine volonté :
But to listen is to act; of that, there’s no doubt. It takes effort and doesn’t happen by default. As anyone who has been in a heated argument—or who’s simply tried to coexist with family members, colleagues, friends, and neighbors—well knows, it’s often easier not to listen. We can tune out and let others’ words wash over us, hearing only what we want to hear, or we can pantomime the act of listening, nodding along while waiting for our turn to speak. Even when we want to be rapt, our attentions wane. Deciding to listen to someone is a meaningful gesture. It accords them a special kind of recognition and respect.
Ce passage rappelle d’ailleurs le point de vue de Clay Christensen sur la notion de Question, dont on parle dans la newsletter n°3. Pdv selon lequel : “Questions are places in your mind where answers fit. If you haven’t asked the question, the answer has nowhere to go. It hits your mind and bounces right off. You have to ask the question — you have to want to know — in order to open up the space for the answer to fit.”
L’écoute est une faculté aujourd’hui mise à l’épreuve des encouragements à toujours plus s’exprimer. Qu’il s’agisse d’encouragements liés aux évolutions de la société ; “Today, we are constantly reminded of the importance of free speech and the First Amendment; we exalt freedom in the expressive realm. Is there some corresponding principle of listening worth defending?”, ou des nouveaux outils régissants celle-ci ; “While social-media platforms do facilitate speech, their business models revolve, in a fundamental way, around the manipulation and commodification of listening. […] A deluge of content and commentary—in which paid advertising, some of it political and deceptive, circulates alongside funny memes, awe-inspiring animal videos, and grassroots opinion—keeps us scrolling, conjuring the illusion of listening. But, by design, such feeds amplify the shallow, outrageous, and self-promoting, discouraging the prolonged engagement that deeper forms of listening require.”
Astra Taylor donne plusieurs pistes de lectures pour comprendre cette notion sous tension à travers la Démocratie historique grecque et celle contemporaine de Trump, les témoignages d’écoliers qu’elle a pu interviewé, les réalisateurs qui l’ont inspirée ou encore les voix d’Alexandria Ocasio-Cortez et Greta Thunberg.
What made America great, they suggested, was every individual’s right to say anything, without reserve and without inviting a response. This was a conception of democratic life that centered on self-expression, with listening left out. In its version of democracy, speech need only go one way.
❓ なぜ ❓
J’ai découvert dans “Why is it interesting”, une autre newsletter que j’aime beaucoup, que la méthode des ‘5 whys’, méthode d’identification de problème, venait, comme bon nombre de méthodos, du monde de l’industrie automobile. Comme le kanban, ça vient de chez Toyota et de leur Production System, un genre de playbook dans lequel Taiichi Ohno détaille les méthodologies et les principes organisant la prise de décision de l’entreprise.
Plus récemment re-popularisé pour l’ère du digital par le bouquin sur le Design Sprint de Google Ventures, la technique des 5 why’s est on ne peut plus simple. Il convient de répéter ‘pourquoi’ un certain nombre de fois afin d’identifier le coeur du problème plutôt que de se limiter à des symptômes ou observations évidentes.
Why did the machine stop?
There was an overload and the fuse blew.Why was there an overload?
The bearing was not sufficiently lubricated.Why was it not lubricated?
The lubrication pump was not pumping sufficiently.Why was it not pumping sufficiently?
The shaft of the pump was worn and rattling.Why was the shaft worn out?
There was no strainer attached and metal scraps got in.
“Pourquoi ?” et “ça dépend” constituant 50% de mes réponses à une question, j’apprécie particulièrement cette méthodo.
🎨 L’artiste au centre du complexe industrialo-artistique 🎨
Content Industrial Complex de Dena Yago décrypte en 3 parties le rapport entre marques, social media et artistes, ainsi que les conditions d’exploitation de ces derniers. L’artiste influenceur est étudié comme pourvoyeur de ‘cultural relevance’ (disons ‘pertinence culturelle’ en français), pour les marques et les consommateurs.
Je vous laisse lire, je vous mets juste des citations comprenant des concepts que je trouve intéressants mais qui ne résument pas l’essai de l’auteure.
‘Exhibitions as content farm’ et ‘artworks as backdrops’ sont des termes qui mettent les mots sur une scène à laquelle j’ai assisté encore il y a 2 weekends. En quête de compréhension du principe d’art contemporain, je suis passé à la galerie Perrotin où j’ai pu assister à un vrai-faux shooting de vrais-faux models se mettant en scène devant les imposants moulages cristallisés de Daniel Arsham. Des mecs très stylés mais à moitié gênés, capables d’assumer des gros baggies oranges mais probablement encore un peu embarrassés à l’idée d’utiliser une galerie et ses oeuvres comme le fond de couleur du studio d’à coté.
Kusama’s installation exemplifies a widespread shift in art towards the exhibition as content farm. Along these lines, successful art is whatever begets the most UGC. Beyond mere likes and engagement, exhibitions encourage gallery- and museumgoers to produce their own unique content, which is then posted to social media. […] this art spams our feeds, as if its ability to demand attention not only within the white cube but outside it proves its very status as art. Escaping once and for all their designated playpen within Bourdieu’s restricted field of cultural production—where artists produce culture for other professional culture-producers, in contrast to the nonrestricted field of mass culture—these artists seek to compete with and triumph over cat memes, creating viable content for social media at large.
And why not? Today, everyone is a culture-producer, producing culture for every other culture-producer. This breakdown in the cultural division of labor is reflected in the emphasis not on images of artworks themselves, but on images (especially selfies) of people posing in front of artworks, proving both the authenticity and presence of the photographed person—think of artworks-as-backdrops.
La notion de Diegetic Advertising caractérise la pratique d’inclusion d’éléments de marques directement dans l’oeuvre.
Drawing from the legacy of pop art, appropriation, and situationist détournement, among other art historical approaches to consumerist and capitalist critique, artists include the logo or name of a brand in the work itself. This is done as an act of criticism, irony, or post-ironic sincerity, this last of which is often compounded with a sense of indignation along the lines of “So what if I love Doritos and Mountain Dew?” This embrace of mass-produced brands also serves to critique the implicit or explicit classism and racism of those who snobbishly reject them.
avec le risque inhérent pour l’artiste de voir son intention détournée
Once an image of such a work is posted to social media and flattened into the content terrain, the artist must acknowledge that their position will be rendered illegible. When seen on the other side of the feed, viewers may not account for the nuances of artistic critique present in a work that includes FedEx boxes, SmartWater, or any other brand name or product as a shorthand for capitalist critique. The work is viewed by social media managers and strategists on the other side of the feed as an homage to the brand, or as genuine “brand love.”
Checkez l’essai. Dena Yago est une énième femme brillante du crew KHOLE, navigant entre stratégie, culture et pratiques artistiques, nous offrant son cerveau sur un plateau.
🕵🏽♂️ L’homme qui murmurait à l’oreille des jeunes (ou l’inverse) 🕵🏽♂️
Pour finir, je parlais d’OnRoad en intro, donc voici un mini podcast / interview d’un de ses fondateurs, Tarik Fontenelle. Il y parle de son parcours, de sa strategic insight agency, de leur contribution à Nothing Beats a Londoner de Nike et quelques autres sujets.
Restezchezvousement votre,
hellofdp.